La loi sur les VSBG, salutaire mais inconnue
Dans le cadre de l’édition 2018 des 16 jours d'activisme (du 25 novembre au 10 décembre) contre les violences faites aux femmes et aux filles, l'Association des Femmes Journalistes, en partenariat avec Cordaid , tenait ce vendredi 7 décembre, à la Maison de la Presse, une synergie impliquant 34 médias burundais dont 26 radios et 8 de la presse écrite sur la loi contre les violences basées sur le genre.
des panélistes provenant du ministère de la Justice, celui de la promotion des Droits humains et du genre, le département à la Police chargé de la protection du genre, l'AFJ (Association des Femmes Juristes ) . Un monde bien calé pour étudier les avancées et défis d'une loi presque inconnue, qui se heurte aux exigences de la coutume burundaise dans laquelle la place de la femme est reléguée au second plan.
1325 qui interpelle les décideurs d'intégrer les femmes dans les instances de prises de décisions pour à la suite donner leur apport dans la construction d’une paix pérenne. Bref une synergie pour un sujet de taille .
Parlant de taille, les chiffres des violences faites aux femmes font froid au dos. Le seul Centre Seruka en Mairie de Bujumbura a enregistré . Un effectif bien bas quand on sait qu’au plus 30% des femmes maltraitées se confient à la police et à la justice, et alors que « même celles qui portent plainte la plupart des cas reviennent faire annuler le dossier », explique Sonia Ndikumasabo , présidente de l'AFJB. Motif avancé : « Elles disent avoir résolu la question à l'amiable, alors qu’en réalité ce retrait de plainte est lié aux terrorismes qu'elles subissent », fait-elle savoir.
Des chiffres toujours alarmants
L’ AFJ qui souligne avoir enregistré 220 cas de demande d’accompagnement juridique de janvier à décembre courant, contre 73 cas effectivement traités : « Sans l'appui d’autres institutions, les résultats resteront limités si nous voulons combattre avec notre expertise les VBG », ajoute Mme Ndikumasabo. Elle en appelle donc aux ministères ayant en charge les droits de la personne humaine et celui de la Justice pour « mieux conjuguer les efforts pour appuyer les victimes. »
Au niveau de la justice, la loi le spécifie comme l'explique Alice Emilie Ntamatungiro, chargée de lutte contre les discriminations liées au genre : « Les accusés de toutes formes de violences, que ce soit entre conjoints, au travail, à l'école, sont punis. Les victimes, une fois au tribunal, bénéficient d’une assistance des avocats publics, et les complices des règlements à l'amiable sont punis comme les forfaitaires. »
Difficile application, faute de moyens
Mais une faille de taille existe. Selon la loi contre les VBG, à l'article 28, « chaque parquet doit avoir 5 avocats expérimentés pour se charger des violences, ce qui n'est pas le cas . Les moyens constituent une balise» fait savoir Mme Ntamatungiro . Avant de promettre « qu'avec l'année qui vient, des avancées significatives seront faites ».
La même faille réside au sein d e la Police. Selon l’article 11 de ladite loi, l'instance chargée de la protection et de la prévention des violences devrait disponibiliser un expert des violences faites aux femmes par poste de police : « Actuellement, il n’en existe qu’un par province », explique Clotilde Mboyongo, du Département à la Police chargé de la prévention et de la protection des violences : « La vision 2019-2025 prévoit cet expert par poste de police .»
Si cette loi est certes bien faite, elle n'est efficace que lorsqu'elle rend justice aux nécessiteuses .Parlant pour le compte du ministère des droits de la personne humaine et du genre, Aline Munyaneza fait savoir que depuis 2017 , il existe des cadres de rencontre tous les deux mois des concernés par les droits de la femme en concertation avec les administrateurs locaux pour échanger sur l'état des lieux des VBG dans les communautés .
Au niveau de l'AFJO, une grande sensibilisation à tous les échelons du pays sur le contenu de la loi est , comme le dit Agnès Nindorera, coordinatrice de l’association, un devoir qui devrait interpeller les instances habiletés pour que même dans les localités les plus éloignées du pays on en soit informé : « C'est d'ailleurs le pourquoi de cette synergie », a-t-elle glissé .
ENCADRÉ
Promulguée le 22 septembre 2016, la Loi portant prévention, protection des victimes et répression des violences basées sur le genre nomme « des pratiques traditionnelles préjudiciables au genre ». C’est notamment :
• Le lévirat: une coutume qui consiste à imposer à une veuve d’épouser son beau-frère ou son beau-père
• « Gukanda (umuvyeyi) »: une forme de viol conjugal tolérée par la culture qui consiste dans le fait qu’un homme force sa femme à avoir des rapports intimes avec lui après l’accouchement avant que celle-ci ne soit rétablie
• Union multiple : vivre en union libre avec plusieurs partenaires à la fois
• « Guteka ibuye rigasha »: pratique culturelle qui consiste, pour un homme, à forcer sa femme ou sa fille d’avoir des rapports sexuels avec un guérisseur traditionnel pour que le remède prescrit « ait ses effets escomptés »
• « Gukazanura » : pratique coutumière qui reconnait à un homme le droit de faire préalablement des rapports sexuels avec sa belle-fille le jour du mariage de son fils
LÉGENDE
La synergie des médias sur la loi contre les VBG a été tenue alors que le monde célébrait 16 jours d’activisme sous le thème : « Les violences faites aux femmes et aux filles, ça nous concerne tous»
Panel de la synergie des médias sur la loi contre les VBG